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jamel
Ajouté : il y a 10 années et 4 mois Réponse à : Projet de loi Protection de l’enfance au Sénat

Bonjour,

Veuillez trouver ci-dessous l’intervention complète du sénateur Alain Milon à propos de la Kafala dans le cadre de la discussion au Sénat du projet de loi sur la protection de l’Enfance.

Le combat de l’association Kafala.fr pour permettre l’accès à la nationalité française des enfants porte ses fruits.

En effet nous avions été auditionné par la cabinet de la ministre de l’époque madame Dominique Bertinotti pour faire des propositions concrètes; propositions reprises dans le rapport intitulé « 40 propositions pour adapter la protection de l’enfance et l’adoption aux réalités d’aujourd’hui »,

“Enfin, je ne voudrais pas clore mon intervention sans évoquer les « enfants de kafala », qui, encore une fois, sont les grands oubliés du dispositif français de la protection de l’enfance.

Les enfants de kafala, ce sont les enfants légalement recueillis dans des pays où le prononcé de l’adoption est interdit par le droit de la famille local, tout comme y sont interdits non seulement la gestation pour autrui, mais aussi toute assistance médicale à la procréation, a fortiori avec donneur de gamète. Le principe est que la seule filiation reconnue est la filiation procréative dans le mariage.

La France est le seul pays européen à avoir reproduit dans son code civil l’interdiction de l’adoption pour les enfants recueillis dans des pays où l’adoption est prohibée, c’est-à-dire essentiellement l’Algérie et le Maroc.
C’est la loi relative à l’adoption internationale du 6 février 2001 qui, mettant fin à une jurisprudence bienveillante de la Cour de cassation, a introduit cet article 370-3, alinéa 2. Depuis lors, il est interdit aux juges français de prononcer l’adoption simple ou plénière de ces enfants.

À plusieurs reprises déjà, j’ai tenté d’emporter votre adhésion à l’abrogation de ce texte discriminatoire. Or une récente circulaire du ministère de la justice du 22 octobre 2014, relative aux effets juridiques du recueil légal en France, clarifie – enfin ! – la situation de ces enfants. Elle affirme le principe de la reconnaissance de plein droit des décisions de kafala rendues à l’étranger en faveur de familles françaises.

La kafala, rebaptisée « recueil légal », est analysée comme une mesure de protection qui n’est pas une adoption, et qui s’apparente, selon les cas, à une tutelle ou à une délégation d’autorité parentale, avec des effets souvent plus larges.
Cette circulaire reconnaît pour la première fois, très officiellement, que l’enfant recueilli en kafala et ayant acquis la nationalité française par déclaration, conformément aux dispositions de l’article 21-12 du code civil, peut être adopté.
Même si cette adoption suppose, comme pour toute adoption, le recueil du consentement des personnes habilitées à donner leur consentement, cela constitue une avancée importante, notamment pour les enfants orphelins ou abandonnés. Mais encore leur faudra-t-il attendre au moins cinq ans : ce n’est qu’après ce très long délai que l’enfant pourra devenir Français.

En effet, actuellement, un enfant qui est recueilli et élevé par une personne de nationalité française ne peut pas réclamer la qualité de Français avant un délai de cinq ans.

Comme le propose le rapport intitulé « 40 propositions pour adapter la protection de l’enfance et l’adoption aux réalités d’aujourd’hui », il est donc opportun, dans l’intérêt de l’enfant recueilli, de réduire le délai lui permettant d’acquérir la nationalité française. Une durée de deux années me semble tout à fait raisonnable, étant rappelé que l’enfant adopté en la forme simple par un Français n’a pas à attendre pour la déclaration de nationalité française.

Il s’agit, là encore, d’une disposition protectrice de l’enfant qui mérite de figurer dans cette proposition de loi et qui répond bien à son objectif. (Applaudissements.)